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Loi de Finances 2025 : Nouveaux dispositifs de taxation pour les Management Packages

Le texte de la loi de finances (« LF ») pour 2025 a définitivement été adopté ce jeudi 6 février par le Sénat. Le texte avait d’ores et déjà obtenu l’aval de l’Assemblée nationale le 5 février après que les motions de censure déposées aient été rejetées.

La LF retient notre attention en ce qu’elle instaure un régime d’imposition des gains réalisés par les salariés et dirigeants lorsque ces titres leur ont été attribués ou qu’ils ont été acquis en contrepartie des fonctions qu’ils exercent dans la société émettrice.

I. LE PROJET DE LOI DE FINANCES

Nouveau régime de taxation des gains réalisés par les salariés ou dirigeants lorsque ces titres leur ont été attribués ou qu’ils ont été acquis « en lien » avec leurs fonctions au sein de la société émettrice (art. 25 bis).

➔ Rappel : des décisions rendues par le Conseil d’Etat le 13 juillet 2021 ont eu pour effet de permettre, dans certains cas, à l’administration fiscale de requalifier dans la catégorie des traitements et salaires les gains résultant de plan d’investissement des dirigeants et salariés (« management

packages ») souscrits par ces derniers à des conditions directement liées à leur activité professionnelle. La LF 2025 entend clarifier le régime fiscal applicable aux situations dans lesquelles un salarié ou dirigeant est propriétaire d’actions ou de titres donnant accès au capital de son entreprise ou d’une société du groupe auquel appartient son entreprise. Après une première tentative avortée en décembre 2024, l’amendement visant à clarifier le régime fiscal des management packages a officiellement été adopté dans le cadre de la LF 2025.

➔ LF 2025 : l’article 25 bis de la LF porte ainsi la création d’un article 163 bisH nouveau dans le Code général des impôts (« CGI ») relatif aux gains de sortie de management package.

➢ Champ d’application du nouveau dispositif :

• L’article 163 bis H nouveau du CGI vise les gains de cession de titres acquis ou attribués à des salariés ou à des dirigeants en contrepartie de leurs fonctions au sein de la société émettrice ou d'une société du groupe auquel la société émettrice appartient (y compris les gains de cession de titres attribués dans le cadre de plans réglementés d'AGA, stock-options et BSPCE).

• Un voile reste à lever, sur la signification à donner à la notion de« lien » avec les fonctions exercées dans la société, a priori conformément à la grille de lecture posée dans les arrêts du 13 juillet 2021.

➢ Régime d’imposition nouveau :

• En principe : le gain de cession est imposé selon les règles de droit commun des traitements et salaires au titre de l’année où le bénéficiaire a disposé de ses titres, les a cédés, convertis ou mis en location.

• Étant entendu que le gain de cession est égal à la différence entre la valeur du titre au jour de la cession et le prix payé pour l’obtenir.

• L’imposition dans la catégorie des traitements et salaires pourra entraîner un taux marginal d’imposition de 59 %, décomposé comme suit :

‒ le barème de l’impôt sur le revenu, pouvant aller jusqu’à 45 % ;

‒ la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, pouvant aller jusque 4 % ;

‒ la contribution salariale, libératoire, de 10 %.

• Enfin, le texte prévoit expressément que le gain n’est pas éligible aux régimes de report ou de sursis d’imposition prévus aux articles 150-0 B et suivants du CGI.

• Par exception, une partie du gain sera imposée selon le régime des plus-values mobilières : prélèvement forfaitaire unique (« PFU ») de 30 % auquel s’ajoutera la CEHR, soit une imposition marginale de 34 %.Toutefois, cela ne tient pas compte de la contribution différentielle sur les hauts revenus (« CDHR ») instituée par la LF 2025.

• Ce régime d’exception ne s’appliquera qu’à certaines conditions :

‒ le bénéficiaire des titres doit supporter un risque de perte qui diffère selon que : 

• les titres ont été acquis dans le cadre des régimes légaux (AGA, stock-options et BSPCE) : les titres doivent présenter un risque de perte de leur valeur d’acquisition ou de souscription ;

• les titres ont été acquis dans le cadre de management packages non qualifiés : les titres doivent présenter un risque de perte du capital souscrit ou acquis.

Point d’attention : pour les titres acquis dans le cadre de management packages non qualifiés, les titres doivent avoir été détenus pendant deux ans au moins avant la cession. Si tel, n’est pas le cas, le gain de cession sera imposé en totalité selon les règles de droit commun des traitements et salaires.

• Si ces conditions sont respectées, la fraction inférieure au plafond de performance financière sera ainsi imposable selon le régime des plus-values mobilières.

• Le plafond étant défini comme le retour sur investissement équivalent à trois fois la performance financière de la société ayant émis les titres concernés. La performance financière de la société sera appréciée sur la période de détention et sera calculé comme suit :

Plafond = Prix d'acquisition ou souscription × (3× Valeur réelle de la société émettrice à la date de cession /Valeur réelle de la société émettrice à la date d′acquisition) − 1)

Le prix d’acquisition ou de souscription correspond :

‒ à la valeur d’acquisition des titres : pour les titres attribués gratuitement dans le cadre d’un plan d’AGA, conforme au code de commerce ;

‒ au prix payé pour leur acquisition ou leur souscription par le bénéficiaire pour les autres titres.

• Ainsi, le nouveau texte prévoit deux types de taxation. A condition de démontrer un risque de perte du capital et de détenir les titres au moins deux ans, le gain restera imposé en plus-value mobilière au taux de 34 %. Avec toutefois un plafond fixé à trois fois le multiple de la performance de la société émettrice des titres sur leur période de détention.

• Au-delà de ce seuil, l’excédent sera traité comme un salaire.

➢ Régime social nouveau :

• La fraction du gain imposée fiscalement dans la catégorie des plus-values reste assujettie aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine au taux de 17,2 %, soit un taux global de 30 % en cas d’application de la flat tax.

• La fraction imposée dans la catégorie des salaires est expressément exclue de l’assiette des charges sociales patronales et salariales mais est assujettie à une nouvelle contribution salariale libératoire de 10 %. 

➢ Exclusion du bénéfice du PEA :

• L’article 25 bis de la LF 2025 prévoit de modifier le 5° bis de l’article 157 du Code général des impôts – lequel exonère normalement d’impôt sur le revenu les produits et plus-values générés par les placements effectués dans le cadre d’un PEA – afin d’exclure de cette exonération le gain de cession qualifié de traitements et salaires.

• Cette disposition s’appliquera aux cessions, dispositions ou mises en location réalisées dès le lendemain de la promulgation de la loi.

• Par ailleurs, l’article L. 221-31 du Code monétaire et financier sera complété afin d’exclure expressément du bénéfice du PEA les titres mentionnés à l’article 163 bis H nouveau du CGI. Seraient ainsi concernés tous les titres qui sont attribués / acquis en contrepartie des fonctions exercées (AGA, BSA, stock-options, AO...).

• Seulement, le texte proposé par la LF nous semble manquer de clarté et de considérations pratiques.

Les renvois de textes laissent subsister un doute quant au traitement fiscal à retenir. En effet, si la lecture du Code monétaire et financier prévoit que l’ensemble des titres ne seront ainsi plus éligibles au PEA, la lecture du CGI parait moins claire. La modification de l’article 157 du CGI pourrait laisser entendre que les titres déjà placés en PEA pourraient recevoir un traitement différencié selon que le gain s’analyse comme des traitements et salaires ou comme des plus-values (soumises au régime des plus-values mobilières).

• La LF risque donc dans certains cas d’entraîner de lourdes conséquences pour les salariés / dirigeants ayant investis en AO en les privant tant du bénéfice de l’exonération du PEA que de la possibilité d’inscrire en PEA de nouveaux titres, y compris issus d’une opération d’échange.

• Il semble tout à fait opportun que l’administration publie, très rapidement, des commentaires pour pouvoir valider l’application dans le temps de ce nouveau dispositif, notamment au regard des AO en PEA ; et pour préciser ce qui définit le lien entre le salarié ou le dirigeant et les fonctions qu’il exerce dans la société émettrice.

II. LA LOI DE FINANCEMENT DE LA SECURITE SOCIALE (« LFSS »)

• La LFSS, également adoptée au Sénat, consacre un article bis qui modifie l’article L. 137-13 du Code de la sécurité sociale et porte à 30 % (contre 20 % actuellement) le taux de la contribution patronale en matière d’attribution d’actions gratuites.